Quatre députés socialistes dénoncent «une forme d’antisarkozysme pavlovien» pratiquée par la direction du parti.
Les couteaux sont sortis au PS. Avec l’échec de sa tentative de bloquer la réforme constitutionnelle de Nicolas Sarkozy, les socialistes s’offrent une nouvelle crise. Une de plus depuis la défaite de Ségolène Royal à l’élection présidentielle. Un spectacle que l’on observe avec satisfaction à l’Élysée. Mardi matin, lors d’une rencontre avec les chefs de la majorité, Nicolas Sarkozy s’est réjoui de voir «le PS en train d’exploser».
Si Jack Lang a concentré les critiques mardi et est désormais implicitement menacé d’exclusion, de nouvelles dissensions sont apparues au sein du parti. Dans une tribune publiée dans Le Monde, quatre députés socialistes, sur les dix-sept qui avaient appelé en mai à un compromis sur le texte de Nicolas Sarkozy, ont mis en cause la gestion de cette réforme par la direction du parti. «Le PS doit s’interroger sur sa stratégie de parti d’opposition, écrivent Manuel Valls, Gaëtan Gorce, Jean-Marie Le Guen et Christophe Caresche. Sa disqualification résulte de son incapacité à s’abstraire d’une forme d’antisarkozysme pavlovien qui le conduit à s’opposer systématiquement à tout projet émanant du président.» Réponse de Jean-Marc Ayrault : «Je crois que la question de la cohérence pour ces personnes, qui ont voté comme nous contre, ne se pose pas à moi mais à eux.» Le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale a en outre trouvé le moyen de s’occuper du cas d’Arnaud Montebourg. Défié par ce dernier qui voulait s’emparer de la présidence du groupe, Jean-Marc Ayrault lui a retiré le poste de vice-président qu’il occupait jusqu’alors, en lui laissant toutefois celui de la justice.
Personnalités incompatibles
Enfin, le PS s’est penché sur le cas des Radicaux de gauche de Jean-Michel Baylet qui ont constitué un précieux renfort pour l’adoption de la réforme. «S’ils changent d’alliance, il faut qu’ils nous le disent tout de suite. On ne va pas continuer à déposer des candidatures communes aux élections sénatoriales et législatives si ce parti franchit le Rubicon et s’en va dans la majorité», a menacé Jean-Marc Ayrault. Bref, au PS mardi, on essayait tant bien que mal de gérer la crise, à défaut de s’interroger sur la meilleure façon de gérer l’opposition à Nicolas Sarkozy.
Ce sera l’une des questions centrales du prochain congrès du parti en novembre à Reims. Elle n’est pas mince puisque, pour schématiser, elle divise le PS en deux camps. Les réformateurs, prêts à accompagner certaines réformes, et les traditionalistes, ancrés dans des mécanismes d’opposition frontale. Problème : à quatre mois du congrès de Reims, plus grand monde au PS n’ose prendre le risque d’afficher des sympathies pour des réformes sarkozystes. Si bien que le PS affiche aujourd’hui une géographie complexe et mouvante. «Plus personne n’y comprend rien», se désolait récemment le député de Paris Jean-Christophe Cambadélis. Et cela risque de durer encore un moment.
Dans la perspective de Reims, les principaux leaders du parti comptent mettre l’été à profit pour tenter de bâtir une majorité. Ce qui suppose un minimum de rapprochements. Mais, pour l’instant, les combinaisons qui permettent d’aboutir à une majorité supposent des alliances de personnalités incompatibles. Ségolène Royal veut aller seule jusqu’au bout. Martine Aubry, comme d’autres, ne veut plus de François Hollande. Ce dernier s’allierait bien avec Bertrand Delanoë mais le maire de Paris voudrait aussi y aller avec Martine Aubry. Le maire de Lyon Gérard Collomb ne veut pas de Laurent Fabius mais apprécie les strausskhaniens qui tentent pourtant de s’allier avec les fabiusiens. Deux courants qui aimeraient, eux aussi, rallier Martine Aubry. Voilà ! Comme le résume Jean-Christophe Cambadélis, «le PS consume son énergie dans un jeu de Rubik’s Cub improbable».